« Encourager les croyants non-pratiquants au progrès », homélie du 26 Septembre

http://www.famillechretienne.fr/sites/default/files/dpistyles/ena_16_9_extra_big/node_1748/58910/public/thumbnails/image/femme_eglise_0.jpg?itok=ID2me00w1631022052Lectures du 26 Septembre

Dans notre monde où la pratique du culte chrétien n’est plus la règle mais l’exception, les passages de l’Écriture lus aujourd’hui peuvent nous éclairer sur la conduite à tenir avec « ceux du dehors », ou plus précisément « ceux de la périphérie » : nous en connaissons tous. Ils entrent dans les églises pour allumer un cierge, ils invoquent parfois le nom du Seigneur Jésus, ils prient la sainte Mère de Dieu pour un défunt. Dans l’angoisse ils supplient les saints. Mais – pour reprendre les expressions du livre des nombres — ils ne se rendent pas fidèlement à la tente de la Rencontre, et restent « dans le camp ». Ils sont comme l’homme qui expulse les démons par le nom de Jésus, mais qui ne fait pas partie de ses disciples. Ils « n’ont pas encore suffisamment de cœur pour recevoir les sacrements de Jésus-Christ, mais se montrent pleins de bienveillance pour les chrétiens » (St Augustin). Comment nous conduire avec eux ?

Le comportement de saint Jean, jeune disciple plein d’ardeur, ressemble à celle du jeune assistant de Moïse, Josué ; et peut-être aussi au nôtre : tous les deux veulent arrêter, empêcher, ceux qui sont manifestement moins parfaits, moins intègres. La réponse de Jésus à Jean l’engage à adopter une vision moins étroite, plus positive sur la situation : « celui qui n’est pas contre nous est pour nous. » Il ajoute même que celui qui pose la plus petite action en faveur d’un chrétien en raison de son appartenance au Christ – comme donner un verre d’eau – ne perd pas sa récompense. Jésus n’affirme pas que cette conduite est suffisante pour donner l’assurance de la vie éternelle, il ne met pas tous les hommes sur le même plan ; mais il laisse le chemin ouvert pour ces personnes.

Si nous voulons avoir en nous les sentiments qui sont dans le Christ, nous devons donc porter un regard d’espérance pour nos frères plus faibles dans la foi, ne pas les rejeter, ne pas couper leur élan, mais les encourager tendrement et patiemment au progrès et à la vertu.

Notre Seigneur parle encore de ces hommes comme des « petits qui croient en moi », que les disciples doivent absolument éviter de faire tomber, de leur faire perdre leur peu de foi. Attention. Nous pouvons devenir des causes de chute pour un petit par des paroles, des gestes et des comportements apparemment anodins, et même pas forcément dirigé contre lui. Des manières et un caractère durs, des paroles cinglantes, des jugements méprisants, l’adhésion sans réserve à une opinion ou à un parti politique, un simple manquement à la courtoisie… Nous portons le nom du Christ, nous avons revêtu le Christ, les gens qui nous regardent voient le Christ. Beaucoup de choses, même acceptées par le monde, ne sont pas dignes de nous. Veiller à ce que le monde voit de moi, prendre en compte l’impression que je donne, écouter les remarques que me font les autres ; tout cela est très exigent, mais outre le fait de ne pas être un scandale pour les petits, cela nous permet de progresser en délicatesse, d’acquérir une conscience plus fine, et de nous conformer à la perfection du Maître.

Ne pas rejeter, mais attirer, tel est l’apostolat que veut Jésus. On objectera peut-être que le faible a parfois besoin d’une parole forte, d’une interpellation vive pour se convertir. Et d’ailleurs, il est arrivé plusieurs fois au saint curé d’Ars de dire à un homme, par exemple : « Monsieur, vous êtes damné », et de lui refuser l’absolution. Sans exclure totalement ce genre d’actes ou de paroles salutaires, nous devons toujours les poser en tremblant, et nous souvenant de l’avertissement du Seigneur : « Celui qui est une occasion de chute pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer. »

Zachée, descends de ton sycomore (31ème dimanche Année C)Demandons au Seigneur de nous remplir lui-même de sa bonté pour nos frères plus faibles. Comme il se contenta de trouver Zachée en haut du sycomore pour lui offrir le salut, des larmes de la pécheresse pour lui pardonner, de la prière du bon larron pour lui accorder le paradis, soyons pleins de tendresse pour ceux qui se disent eux-mêmes non-pratiquants. Nous sommes les intermédiaires choisis par Dieu pour le représenter devant eux, et pour les représenter devant l’autel de Dieu. Qu’ils soient offerts, avec nous-mêmes, dans le pain et le vin que nous apportons, pour que nous devenions un jour, tous ensemble, « un seul corps et un seul esprit dans le Christ. »

Abbé Louis Fabre +