(sur les lectures du 13è dimanche du Temps Ordinaire )
Si je veux me rendre de Nice à Antibes en un temps et sans transpirer, j’ai le choix entre deux moyens : la voiture ou le train ; l’un ou l’autre : moyens alternatifs. Si je prends la voiture, j’aurai besoin aussi d’essence. Voiture et essence, les deux ensemble : moyens conjoints.
Voici le message que je voudrais souligner aujourd’hui à partir de l’évangile : pour le long voyage jusqu’à la vie éternelle, Dieu nous donne deux moyens conjoints, la foi et les sacrements ; les deux ensemble.
La femme hémorroïsse, que nul médecin ne pouvait soigner, et que la loi juive déclarait impure depuis 12 ans, rencontra un jour le médecin véritable, le seul qui puisse sauver tout l’homme, corps et âme. Comment cette pauvre femme a-t-elle obtenu sa guérison ? Elle a touché les vêtements du Sauveur. Mais quelques instants plus tard, il lui dit : « ta foi t’a sauvée. » Foi et contact physique, indissociablement ; ces deux moyens sont si puissants que la femme semble presque voler la bénédiction du Christ. Elle vient par derrière, touche le Sauveur, et sent dans son corps que son mal est guéri. Une puissance de vie est sortie de Jésus. Mais ce n’est pas seulement son corps. Son cœur va aussi être touché, puisque la femme est encore saisie de crainte et toute tremblante quand le Seigneur Jésus lui dit : « Va en paix et sois guérie de ton mal. » Littéralement, de ta peine, de ton fléau. Qu’est-ce que la femme a cru pour que le simple fait de toucher les vêtements de Jésus produise ce qui était impossible aux hommes les plus habiles ? Elle a cru que la puissance de Dieu en personne habitait ce corps, et pouvait se communiquer à elle. Comme le dit saint Paul : « Dans le Christ habite corporellement toute la plénitude de la divinité. ». Voilà la grandeur inouïe du mystère de l’incarnation.
Maintenant se pose la question : aujourd’hui, le Fils de Dieu Ressuscité est monté aux cieux, et il trône à la droite du Père, en présence des anges et des esprits bienheureux qui chantent sa gloire. Comment cet évangile peut-il s’appliquer à nous ? Nous croyons au Christ, mais monterons-nous au ciel pour toucher son corps vivifiant ? Question fondamentale, et terrible, car notre vie en dépend, corps et âme. Rappelons-nous donc les paroles de notre Sauveur au moment où il disparaissait aux yeux de ses apôtres : « Allez… De toutes les nations faites des disciples… Baptisez… Enseignez … Et moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin des temps. » C’est dans sa Sainte Eglise que le Seigneur est présent aujourd’hui. A travers elle, il nous touche par ses Sacrements. Léon le Grand a dit « Ce qui était visible dans notre Sauveur est passé dans ses sacrements. » Les sept sacrements sont les dons de Dieu où le Christ agit à travers ses ministres sacrés. Baptême, Confirmation, Eucharistie, Pénitence, Onction des malades, Mariage et Ordination.
Il existe aujourd’hui en grand nombre des personnes qui se disent « croyants non pratiquants ». D’après eux, une relation avec Dieu dans le secret de leur cœur suffit à les rendre justes ; ils prétendent recueillir les bénédictions divines tout en rejetant la rigidité des dogmes de l’Eglise, et les formes extérieures du culte, qu’ils considèrent comme des œuvres humaines. Ils répugnent à se mêler à une communauté qu’ils jugent indigne, pécheresse, hypocrite. Ces malheureux sont comme cette femme hémorroïsse, qui connaissant celui qui peut la sauver, aurait renoncé à pénétrer la foule épaisse pour toucher la frange de son vêtement.
Il y a également des « pratiquants non croyants ». Leur religion est parfois impeccable, mais seulement extérieure, comme une routine qui leur donne bonne conscience. Elle ne sert à rien. Ceux-là sont semblables à ceux que les prophètes ont dénoncés autrefois : « ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. » Dans notre évangile, pensons à la foule agglutinée à Jésus, jusqu’à l’écraser ; mais ce contact reste stérile, faute de foi. Pratiquer la religion avec foi, c’est venir au Seigneur en mettant toute sa confiance en lui, en renonçant à mettre sa confiance dans les biens terrestres (biens matériels, relations, qualités et capacités personnelles…)
Foi et Sacrements sont les dons de l’amour de notre Dieu pour aller jusqu’à lui. Aujourd’hui nous sommes venus pour célébrer ensemble le plus grand des Sacrements, le « Saint-Sacrement ». Nous allons prendre part, personnellement, au sacrifice du Christ. Ne soyons pas de ceux-là sur qui la grâce du ciel glisse et reste sans effet. Approchons-nous du Corps vivifiant du Christ avec un cœur humble, fidèle et qui s’en remet totalement à lui. Recevons-le avec la certitude qu’à son contact, nous serons sauvés. C’est ce que nous répondons au prêtre qui nous présente l’hostie consacrée: AMEN.
Abbé Louis Fabre +