Méditation du dimanche des Rameaux

  • Le dimanche des Rameaux | Le Cyber'Mag de MarjorieL’ÉVANGILE DES RAMEAUX : (Mt 21, 1-11)
    L’entrée messianique de Jésus à Jérusalem
  • PREMIÈRE LECTURE : (Is 50, 4-7)
    Je n’ai pas caché ma face devant les outrages, je sais que je ne serai pas confondu
  • PSAUME : (Ps 21 (22), , 8-9, 17-18a, 19-20, 22c-24a)
    Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?
  • DEUXIÈME LECTURE : (Ph 2, 6-11)
    Il s’est abaissé : c’est pourquoi Dieu l’a exalté
  • LA PASSION : (Mt 26, 14 – 27, 66)
    Pour nous, le Christ est devenu obéissant, jusqu’à la mort, et la mort de la croix

Les lectures bibliques sont sur internet

 

« Hosanna au fils de David !  Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Hosanna au plus haut des cieux » (cf. Mt 21, 9). Ce refrain, nous le connaissons bien. C’est le chant des foules au moment de l’entrée de Jésus à Jérusalem ; ces foules qui jettent leurs manteaux sur son passage et agitent des branches de palmiers et des rameaux d’olivier pour manifester leur joie. « Hosanna… », c’est aussi le refrain que nous chantons durant la célébration eucharistique puisqu’il est la seconde partie du Sanctus, cette belle et solennelle acclamation de la Préface. Oui, dans un premier temps, c’est la joie qui domine en ce Dimanche des Rameaux qui ouvre la Semaine Sainte. Oserai-je dire que cette Semaine Sainte est la plus particulière que nous ayons à vivre depuis le temps de la guerre 39-45, pour celles et ceux qui l’ont connu. Même si entre temps, dans certains lieux, d’autres conflits ou fléaux ont fait vivre aux chrétiens une semaine sainte particulière. Je pense par exemple aux chrétiens d’Orient. Ce temps de confinement nous permet de vivre peut-être plus intensément la Semaine Sainte, en méditant, jour après jour, les derniers moments de la vie terrestre de Jésus, le « fils de David » pour les foules qui l’acclament à Jérusalem, notre Seigneur et Christ, Fils du Dieu Sauveur, pour les chrétiens que nous sommes.

Lorsque débute la Prière Eucharistique de la messe, sommet de toute la célébration, nous chantons le Sanctus. La première partie nous renvoie au livre du prophète Isaïe, témoin de la liturgie céleste : « Saint, saint, saint, le Seigneur Dieu de l’univers. Le ciel et la terre son remplis de ta gloire » (cf. Is 6, 3). Le chant des anges devant la sainteté de notre Dieu est mis dans notre bouche par la liturgie. C’est toujours le Seigneur lui-même qui nous apprend à le louer, à le prier ; il nous donne les mots justes que le Saint-Esprit nous fait crier de tout notre cœur, de toute notre foi. La deuxième partie du Sanctus nous renvoie à l’Évangile, au moment de l’entrée triomphale de celui que les foules de Jérusalem reconnaissent comme leur roi : « Hosanna au fils de David ». David étant le Roi par excellence dans la bible. En chantant « Hosanna » mot hébreu signifiant « Sauve ! », les foules attendent un salut qui réponde à leur situation du moment. Lorsque les quatre évangélistes mettent par écrit ce cri des foules, c’est pour aspirer à un autre salut, le vrai Salut de Dieu qui n’est pas pour un moment donné, une situation particulière, mais pour l’éternité. Un Salut qui est déjà arrivé en la personne de Jésus « celui qui vient au nom du Seigneur » et qu’il nous a offert en souffrant sa Passion, en mourant sur la Croix et en ressuscitant du tombeau. Désormais, les paroles évangéliques prennent tout leur sens dans le mystère pascal du Seigneur Jésus Christ.

Aussi, chers frères et sœurs, lorsque nous chantons « Hosanna » à la messe ou lors de la procession des Rameaux – que nous ne pourrons pas faire cette année, hélas -, nous chantons l’espérance au cœur. Nous appelons un Salut qui est déjà arrivé. Dans ce cas, pourquoi l’appeler encore ? Pourquoi demander au Seigneur de nous sauver puisque nous le sommes déjà ? Ridicule ? Non. Réaliste. Qui ne doute jamais de ce Salut ? Même le plus grand saint a eu des moments de doute dans sa vie. Vous en avez, chers frères et sœurs. J’en ai aussi moi-même. La situation actuelle d’être confinés à cause du coronavirus, de voir de nombreuses personnes être contaminées ou mourir, ne peuvent pas laisser de marbre nos cœurs. Seuls les cœurs de pierre, égoïstes et insensibles, demeurent impassibles devant cette situation désastreuse où l’homme a sa part de responsabilité pour ne pas dire toute la responsabilité. Du coup, nous avons besoin de fortifier sans cesse notre foi, de raviver notre espérance et donc de dire encore et toujours au Seigneur : « Hosanna ».

Certitude ? Espérance ? Foi ? Conviction ? La liste est longue des sentiments que nous pouvons éprouver, que nous devons éprouver durant ce temps insolite. Les épreuves viennent toujours ébranler nos certitudes, notre foi. Et si c’était faux ? Et si c’était juste « un opium pour le peuple » comme le disait Karl MARX en parlant de la religion chrétienne ? Et si c’était « un avertissement de Dieu, le commencement de l’apocalypse, voire la punition du ciel » comme l’affirment les fondamentalistes religieux ? En réponse, je vous suggère de vous tourner avec moi vers le Christ qui meurt en croix. Sa passion n’a pas été vaine. Sa mort est salvatrice. Nous le savons bien sinon nous n’avons plus rien à faire à l’église, il est inutile de chanter « Hosanna » et surtout il devient blasphématoire de communier au Corps du Christ si nous ne croyons pas que Celui qui était mort est vivant et que nous attendons sa Venue dans la gloire.

Oui, chers frères et sœurs, tournons-nous ensemble vers la croix et écoutons la prière de Jésus : « Éli, Éli, lema sabactani ? Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (cf. Mt 27, 46). Faisons nôtre cette prière car il s’agit bien d’une prière. Ces mots ne sont pas qu’une réaction humaine de Jésus, même si, comme tout homme, Jésus a peut-être ressenti le sentiment d’abandon de Dieu à ce moment tragique. Jésus n’est pas monté la joie au cœur sur la croix : « Je ressusciterai nananère… » Non. Même s’il le savait, Jésus n’a pas fait semblant de souffrir, ni de mourir. Sa prière en Croix, c’est le premier verset du Psaume 21 que nous chantons dans la liturgie de ce Dimanche des Rameaux. Durant cette Semaine Sainte, je vous propose de le lire et de le méditer chaque jour. Pas les quelques versets qui nous sont donnés, mais le Psaume 21 en entier (cliquer ici ). En effet, il y a ces quelques mots à la fin du verset 22 qui transforment complètement le ton tragique des versets précédents : « Tu m’as répondu ». Jésus a la certitude, l’espérance, la foi, la conviction, pour reprendre tous les mots que j’ai employés plus haut, que Dieu lui répondra. Et cette phrase au passé composé : « Tu m’as répondu » manifeste que c’est déjà acquis. Nous-mêmes, en cette période incertaine, nous pouvons nous raccrocher à ces mots du Psaume. Dieu ne nous apporte pas un salut seulement momentané, mais un Salut éternel. Quoiqu’il arrive, quoiqu’il nous arrive, Dieu nous répond, Il nous a déjà répondu. « Le Seigneur mon Dieu vient à mon secours » dit le prophète Isaïe dans la première lecture (cf. Is 50, 7).

Aujourd’hui, nous commençons la Semaine Sainte. Oui, « Hosanna » parce qu’il nous faut encore accueillir avec foi le Salut que Dieu nous a obtenu par la mort de son Fils sur la croix. Et confiance et espérance car « Tu m’as répondu, mon Dieu ! » Pâques est au bout de la Semaine Sainte. C’est la réponse du Père à son Fils dans la puissance du Saint-Esprit. C’est la réponse à notre foi, chers frères et sœurs. Dieu est Dieu. Et comme l’a entendu et médité la Sainte Vierge Marie : « Rien n’est impossible à Dieu » (cf. Lc 1, 37). Que cette Semaine Sainte soit vraiment vécue comme si c’était notre passion, notre mort et notre résurrection avec le Christ Jésus. Ce que nous vivons symboliquement mais réellement dans la foi et l’espérance, sera vécu dans la vérité de l’amour et de l’éternité de Dieu un jour.

Abbé Jean-Paul Filippi