Méditation du Jeudi Saint

En ce jeudi Saint, très particulier à cause de la Pandémie du Covid-19 qui secoue le monde, nous entrons aujourd’hui dans le Triduum pascal c’est-à-dire la période de trois jours durant laquelle les chrétiens célèbrent le cœur de leur foi en la mort et la résurrection de Jésus Christ. Nous célébrons ce que Jésus a appelé son «   son heure » l’heure où il va instituer l’Eucharistie et le sacerdoce. L’heure à laquelle chacun de nous surement veut avoir des nouvelles encourageantes ou réconfortantes en ce qui concerne la situation actuelle que nous vivions.

Nous nous souvenons aujourd’hui avec toute l’Eglise de la dernière Cène de notre Seigneur. C’est au cours de ce repas que Jésus a institué l’Eucharistie et le sacerdoce. C’est aussi la fête du prêtre, ministre de l’Eucharistie. En effet le mémorial ou la Cène du Seigneur Jésus est bien plus qu’un simple geste ou souvenir. Cette Cène permet on peut le dire, au passé de s’accomplir dans notre présent et elle est ébauche de l’avenir.

Pour nous préparer à l’événement que nous célébrons ce soir, nous avons le récit de l’Exode dans la première lecture dans lequel Dieu donne des consignes, des prescriptions concernant le repas pascal. Dieu prescrit des normes au peuple hébreu pour célébrer la Pâque. Tous les ans, la famille et le voisinage devaient se réunir pour le prendre ensemble en souvenir de la libération d’Egypte. C’était une manière de se souvenir que notre Dieu est un Dieu sauveur. Il a libéré son peuple de l’oppression et du mal qui risquait de le perdre. Aussi un Dieu qui est proche de nous aujourd’hui comme toujours pour nous libérer de cette pandémie.

 

Tout le Triduum pascal nous invitent à l’action. Vous me diriez, mais comment agir en ce temps de confinement ? tout simplement en restant chez nous, mais en faisant quelque chose d’utile. En nous rappelant le sacrifice de l’Agneau pascal suivi d’un repas de communion entre les fidèles d’Israël, le Livre de l’Exode inscrit dans notre mémoire profonde la figure de l’Agneau à laquelle Israël s’est identifié. Figure d’innocence, certes ; figure de perfection, figure de choix qui nous oriente d’ores et déjà vers l’Agneau de Dieu pleinement révélé en Jésus Christ. L’ordre adressé à Israël, c’est que cet agneau partagé, sacrifié, mangé, soit au cœur de la vie religieuse de ce peuple : « Vous en ferez pour le Seigneur une fête de pèlerinage. C’est une loi perpétuelle, d’âge en âge, vous le fêterez. » (Exode 12, 14).

Il s’agit bien dans ce mémorial, d’accomplir, de réitérer le Repas du Seigneur, pas seulement en nous souvenant de Lui. Car, cela n’est pas difficile de l’évoquer. Mais il s’agit, plus fondamentalement, de le laisser advenir de telle sorte que le souvenir devienne mémoire vive, présence réelle et que nous ne cessions de rendre grâce de cela. Le Dieu que nous célébrons aujourd’hui continue à vouloir libérer son peuple. Le principal travail, c’est lui qui le fait dans le cœur des hommes.

L’Apôtre Saint Paul, dans la deuxième lecture tirée de sa première lettre aux Corinthiens, nous rappelle dans quelles conditions doit être célébré le repas pascal. Nous pouvons comprendre facilement son message, écrit pour une communauté qui était divisée par des jalousies et des mesquineries, comme cela peut aussi arriver aujourd’hui dans nos communautés de vie. Avant de célébrer l’Eucharistie, il faut en sortir car ces disputes, sont en contradiction avec la célébration de la messe. Car l’Eucharistie est le sommet non seulement de la prière de l’Eglise, mais elle est aussi le sommet de sa vie. C’est en Elle que le Christ se rend présent dans sa Divinité et dans son Humanité. Il est donc vrai que sans la charité ou l’amour du prochain, notre communion n’est qu’une hypocrisie. En tant que chrétiens, les paroles de saint Paul « chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur.»  doivent à chaque Eucharistie raviver notre foi. Nous n’aurons jamais fini de méditer sur cette générosité qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. Il est important que notre vie et nos rapports entre nous soient en accord avec cet amour de Dieu.

La page d’Évangile de saint Jean ne nous parle pas directement de l’Eucharistie. Saint Jean nous décrit un geste de Jésus qui nous y prépare. Le soir du Jeudi saint, le Seigneur Jésus Christ lave les pieds de ses disciples. C’était un geste d’hospitalité qui se pratiquait d’une manière habituelle dans le monde du Moyen Orient. Un tel service était normalement accompli par un esclave. Ici, c’est Jésus, celui qu’on appelle « Maître et Seigneur » qui se met à genoux devant les siens pour leur laver les pieds.

Les disciples n’ont reviennent pas, ils n’ont certainement pas compris ce que signifie l’humilité ou le service. Ce que Jésus nous demande, et que Pierre a eu du mal à accepter, c’est de nous laisser aimer par lui ; c’est là un premier point. Il nous demande surtout d’aimer comme lui, avec la même radicalité et le même absolu. Le disciple doit, lui aussi, se mettre en tablier pour servir ses frères. Comme Jésus, nous avons à les rejoindre au plus bas de leur fragilité en les considérant comme supérieurs à nous-mêmes.

En ce Jeudi Saint, très particulier, les ministres de Dieu (Prêtres ou diacres ) à cause la pandémie du Covid-19 ne peuvent faire le rite de lavement des pieds à leurs fideles, mais chacun dans sa famille ou dans la communauté où il passe son confinement peut faire ce geste très simple : laver les pieds de l’autre. « Si donc moi, le Seigneur et le Maitre, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres ». Non pour mimer le Seigneur, mais pour nous imprégner de ce qu’Il est. Le Seigneur nous demande tous d’en faire autant car il est un geste significatif d’humilité, de liberté, de service. Laver les pieds c’est aussi un sacré acte d’amitié! Jésus aurait pu serrer la main aux disciples ou leur faire une grosse bise en leur disant « ciao, ce soir je vais être trahi et demain je vais mourir ». Non, il va passer un instant avec chacun d’entre eux et les toucher avec humanité et gentillesse.

Comme beaucoup d’entre nous, Pierre oublie que ce geste d’humilité nous remet tous à notre place. Nous devons nous mettre au service de l’autre ce n’est pas s’abaisser. Ce geste rappelle que le Christ s’est mis au service de l’humanité et que nous sommes nous aussi les serviteurs les uns des autres. Le lavement des pieds n’est qu’un signe de l’amour du Christ pour les siens. La preuve suprême leur sera donnée le lendemain par sa mort sur la croix.

La bonne nouvelle, le grand message de ce jeudi Saint c’est que Jésus fait de nous ses amis intimes. Cela vaut la peine de nous arrêter pour connaître ses désirs sur nous. Il se donne à nous pour nous communiquer sa vie, son amour. C’est de cela que nous avons à témoigner dans nos familles, dans nos lieux de vie et de travail. Le Christ a livré sa vie pour nous et pour la multitude. Notre amour doit être de plus en plus à la mesure du sien, de plus en plus universel. C’est cet amour que les chrétiens célèbrent dans l’Eucharistie.

Nous bénissons en ce jour le Seigneur pour le don du Sacerdoce ministériel, pour l’Eucharistie et tous les sacrements qu’il nous a donné. Demandons au Seigneur, la grâce de l’aimer, de le servir et de servir nos frères en toute humilité. Apprends-nous, Seigneur à aimer sans calcul, simplement et humblement.

Abbé Jean-Bruno Maouango